L'irraisonnable : quand l'excès devient source de création

31 Aug 2024
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Jakob

L'être humain, dans sa quête de sens et de compréhension du monde, a toujours oscillé entre deux pôles : la raison, balise rassurante dans un océan d'incertitudes, et l'irrationnel, source d'angoisse autant que de fascination. Si la pensée cartésienne a permis des avancées scientifiques et technologiques considérables, elle trouve ses limites face à l'imprévisibilité de l'existence, à l'émotion brute, à la pulsion créatrice. Qu'est-ce donc que l'opposé du raisonnable, de ce qui semble dicté par le bon sens ? Un abîme de folie ? Un espace de liberté ? Sans doute un peu des deux.

Depuis l'aube des temps, les mythes et les religions explorent ce territoire de l'irrationnel. Dieux capricieux, créatures fantastiques, forces occultes... Autant de manifestations d'un imaginaire qui transcende la logique pour toucher au plus profond de l'âme humaine. L'art, dans toutes ses formes, se nourrit lui aussi de cet irrationnel. La peinture, la musique, la littérature, le théâtre, le cinéma, tous puisent dans ce puits sans fond pour donner naissance à des œuvres qui nous bouleversent, nous interrogent, nous transportent. Car l'émotion n'a que faire de la raison, elle s'exprime sans filtre, sans calcul.

Mais l'irrationnel ne se limite pas au domaine artistique. L'histoire regorge d'exemples de décisions politiques, de mouvements sociaux, de guerres même, qui ont pris racine dans des passions exacerbées, des peurs irrationnelles, des idéologies fanatiques. L'amour, sentiment par excellence, n'est-il pas lui-même souvent teinté d'irrationalité ? Le cœur a ses raisons que la raison ignore, disait Pascal. Embrasser l'irraisonnable, c'est accepter d'être parfois déraisonnable, de se laisser guider par l'instinct, l'intuition, l'émotion. C'est prendre le risque de se tromper, de se perdre, mais aussi celui de découvrir des horizons insoupçonnés, de vivre des expériences hors du commun.

Il est cependant crucial de ne pas tomber dans l'excès. Si l'irrationnel peut être source de créativité et d'épanouissement, il peut également mener à la destruction, à la folie, à la barbarie. La frontière entre génie et folie est souvent ténue. L'équilibre est donc de mise, un dosage subtil entre la raison qui structure et l'irrationnel qui dynamise, entre le contrôle et le lâcher-prise. L'enjeu est de parvenir à cultiver en soi cette part d'irrationnel sans la laisser nous submerger, à l'apprivoiser pour en faire un moteur, une source d'inspiration.

Car l'irrationnel, s'il peut être effrayant, est aussi un formidable vecteur de changement, de rupture avec les conventions, les normes, les idées reçues. C'est dans la remise en question permanente, dans la capacité à sortir des sentiers battus, à embrasser l'inconnu, que l'humanité a pu progresser, évoluer, se réinventer. L'irrationnel, c'est l'étincelle qui met le feu aux poudres, c'est le chaos primordial d'où naît la création. C'est une force ambivalente, capable du meilleur comme du pire, à nous de l'apprivoiser pour la mettre au service de notre épanouissement personnel et collectif.

L'irrationnel, c'est finalement une invitation à sortir de notre zone de confort, à explorer les zones d'ombre de notre être, à accepter la complexité du monde et de la vie. C'est une ode à la liberté, à l'imagination, à l'émotion, une invitation à vivre pleinement, intensément, passionnément.

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